On est en plein examen (2e et dernière lecture) de la loi Biodiversité à l'Assemblée nationale, qui comme vous le savez comporte divers amendements sur la continuité écologique.
Vous pouvez écouter cette vidéo à partir de 02:05 environ:
http://videos.assemblee-nationale.fr/vi ... -mars-2016
Sinon ci-dessous des versions écrites.
En gros, à la commission DD :
- l'amendement qui demandait une analyse coût avantage a été boulé
- l'amendement qui accordait 3 ans (
à condition d'avoir engagé le dossier) a été monté à 5 ans
Vous observerez et / ou verrez :
- que la rapporteure
GAILLARD dit absolument n'importe quoi, prétend que la continuité c'est la DCE 2000 et accuse la "fronde des moulins" de rejeter la DCE 2000. C'est une honte de proférer de telles énormités quand on est à la commission DD ;
- que le député
PLISSON assume qu'il préfère les poissons aux moulins (je suggère évidemment à tous les moulins de lui exprimer leur propre préférence en lui écrivant)
- que la majorité actuelle vote bêtement et idéologiquement sur la base de ces informations biaisées, alors que l'amendement rejeté demandait simplement de mieux concilier les usages.
Conclusion : il va falloir encore et encore informer les parlementaires (et rendre public qu'on les informe) pour qu'ils cessent ces choix extrémistes issus de bourrages de crâne, de méconnaissance de dossier ou de chantages locaux à la subvention.
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Article 51 undecies A (article 214-17 du code de l’environnement) : Articulation entre la continuité écologique des cours d’eau et la préservation des moulins (supprimé)
La commission aborde l’amendement CD603 de la rapporteure, tendant à supprimer l’article.
Mme la rapporteure. Cet article porterait atteinte à la restauration des continuités écologiques. Or nous devons être très prudents sur ces sujets.
Mme la secrétaire d’État. Avis favorable.
M. Julien Aubert. Cette argumentation nous laisse un peu sur notre faim ! L’objectif de l’article est de « concili[er] [le] rétablissement de la continuité écologique avec les différents usages de l’eau, en particulier le développement de la production d’électricité d’origine renouvelable » : cela ne paraît pas critiquable. Mme la rapporteure indique que la mesure porterait atteinte à la restauration des continuités écologiques, mais ces mécanismes de production d’électricité d’origine renouvelable existent déjà. Quel risque cet article, dont la rédaction me semble plutôt pragmatique, comporte-t-il précisément ?
M. Jean-Marie Sermier. Personne ne conteste la nécessité des corridors écologiques dans l’eau et de la circulation des poissons. Mais certains ouvrages et usages permettent de produire de l’électricité tout en préservant les intérêts environnementaux, patrimoniaux ou sportifs – je songe aux sports aquatiques. Prenons donc garde de détruire des barrages qui n’empêchent pas les poissons migrateurs de se déplacer.
Mme la rapporteure. Aux termes de la directive-cadre sur l’eau, il faut restaurer la continuité écologique de nos rivières – la trame bleue. Nous avons des outils qui permettent d’appliquer cette directive, en particulier les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et les schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) lorsqu’ils existent. Dans ce cadre, tout ouvrage doit faire l’objet d’un examen, en concertation avec ses propriétaires, afin de savoir s’il est nécessaire ou non de l’aménager ou de l’araser.
Il serait très difficile de « privilégi[er] les mesures d’aménagement ou de gestion des ouvrages chaque fois que le bilan entre les coûts et les avantages desdites mesures en comparaison d’une mesure d’effacement le justifie », comme le préconise l’article.
Il y a aujourd’hui une véritable fronde des propriétaires de moulins ou d’autres ouvrages qui refusent la directive-cadre sur l’eau et veulent empêcher toute intervention sur leurs ouvrages. Nos collègues Françoise Dubois et Jean-Pierre Vigier ont publié à ce sujet un rapport très intéressant qui rappelle les objectifs de la directive. Personne n’oblige à l’effacement des ouvrages, mais il est indispensable de les améliorer au cas par cas, qu’ils soient hydroélectriques ou non. Le maître d’ouvrage, par exemple un syndicat mixte, doit pouvoir travailler avec chaque propriétaire pour étudier avec lui la possibilité de maintenir l’ouvrage.
La réglementation actuelle est conservée : nul besoin de cet article pour mettre en œuvre la trame bleue, absolument nécessaire à la circulation des poissons et au transport des sédiments.
Mme Françoise Dubois. Je suis d’accord avec la rapporteure, mais il est un peu dommage de supprimer l’article. En effet, les propriétaires de moulins sont des acteurs importants en matière de continuité écologique aquatique ; or, en préparant notre rapport d’information avec Jean-Pierre Vigier, nous nous sommes aperçus que ce ne sont pas eux qui sont le plus écoutés. Voilà pourquoi nous avions fait part de nos réserves vis-à-vis de l’effacement des barrages et de l’installation de passes à poissons, qui ne sont pas toujours très utiles mais qui coûtent très cher.
Les propriétaires des moulins, qui ont des droits et des devoirs, entretiennent en général correctement leur propriété, grâce aux associations et aux aides existantes. Il existe des solutions alternatives comme les rivières de contournement, qui ne coûtent rien, beaucoup moins cher en tout cas que les passes à poissons. Il peut donc être intéressant de conserver les ouvrages sur les petites rivières. Les propriétaires de moulins nous ont dit qu’ils n’étaient invités à participer à aucune instance de concertation, à la différence des pêcheurs ou des chasseurs : c’est regrettable.
M. Philippe Plisson. Je préside une communauté de communes qui gère un bassin versant et nous nous efforçons de restaurer la continuité écologique, en concertation avec les propriétaires de moulins. Il faut savoir qu’une alose ne peut pas franchir cinq obstacles consécutifs. Nous devons donc privilégier, soit la biodiversité, soit les moulins. Or ceux-ci sont pour les poissons des obstacles infranchissables.
N’est-ce pas une loi sur la biodiversité que nous examinons ? À un moment donné, il y a des choix à faire ; et, en ce qui me concerne, je fais le choix du poisson. (Sourires)
Il faut supprimer cet article.
La commission adopte l’amendement.
En conséquence, les amendements CD1076 de la rapporteure, CD873 et CD1036 de M. Jean Launay, CD201 de M. Jean-Marie Sermier et CD690 de M. Jacques Krabal tombent, et l’article 51 undecies A est supprimé.
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Article 51 undecies B (article 214-17 du code de l’environnement) : Délai de trois ans accordé aux propriétaires de bonne foi pour la réalisation des travaux sur les moulins permettant l’amélioration de la continuité écologique
La commission est saisie de l’amendement CD202 de M. Jean-Marie Sermier.
M. Jean-Marie Sermier. Plus de 2 200 cours d’eau sont actuellement classés en liste 2, ce qui impose que 15 000 ouvrages soient traités en cinq ans pour permettre la circulation des poissons migrateurs et le transport de sédiments. Or seule une centaine d’ouvrages est traitée chaque année dans chacun des grands bassins, soit environ 600 par an.
L’amendement propose donc de donner la priorité aux cours d’eau les plus sensibles, ceux qui sont classés « grands migrateurs », en introduisant un niveau de priorité supplémentaire au sein de la liste 2, afin d’agir de manière à la fois réaliste et proportionnée aux enjeux.
Mme la rapporteure. J’entends vos préoccupations. Je sais aussi – ce sujet important n’est pas consensuel – qu’il est nécessaire d’accorder un délai supplémentaire aux propriétaires d’ouvrages qui ont engagé des travaux. Je salue donc l’initiative qu’a prise le Sénat de voter cet article, et je soutiendrai par ailleurs dans un amendement à venir votre proposition de porter de trois à cinq ans le délai supplémentaire accordé aux propriétaires.
Mais l’introduction d’un niveau supplémentaire de priorité au profit des « grands migrateurs » impliquerait probablement leur classement dans une troisième catégorie, ce qui pourrait remettre en cause les processus en cours dans des rivières où il n’y a pas de migrateurs. Cela risque d’être contre-productif.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la secrétaire d’État. Je suis d’accord pour dire qu’il faut hiérarchiser les actions à mener. Mais l’amendement complique le dispositif existant, ajusté en première lecture. Donner la priorité aux poissons grands migrateurs par rapport aux espèces holobiotiques et à la restauration de l’hydromorphologie de nos rivières n’est pas une bonne idée. D’une part, cette stratégie concentre les efforts sur des situations complexes alors qu’il en existe beaucoup d’autres pour lesquelles il sera plus facile d’agir immédiatement avec succès, ce qui déclenchera une dynamique positive. D’autre part, elle ne résout pas le problème de la restauration de l’hydromorphologie, indispensable pour atteindre le bon état écologique demandé par l’Europe.
Avis défavorable.
M. Jean-Marie Sermier. Je suis plutôt satisfait que vous souhaitiez prolonger le délai, Madame la rapporteure. Mais je répète les chiffres : 15 000 ouvrages à traiter, alors que 600 le sont chaque année ; à ce rythme, il faudrait 25 ans pour réaliser la totalité de l’opération. J’accepte toutefois de retirer mon amendement.
L’amendement est retiré.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD465, CD464, CD463 et CD467 de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CD203 de M. Jean-Marie Sermier.
M. Jean-Marie Sermier. Comme je l’ai indiqué lors de l’examen de l’amendement CD202, il s’agit de porter de trois à cinq ans le délai supplémentaire consenti aux exploitants ou propriétaires.
Mme la rapporteure. Avis favorable.
Mme la secrétaire d’État. J’ai conscience de l’ampleur du travail que nécessite la restauration de la continuité écologique de l’ensemble de nos rivières. Le Sénat a ainsi introduit par amendement la possibilité d’accorder un délai de réalisation supplémentaire aux exploitants ou propriétaires de bonne foi qui ont entamé les démarches nécessaires en déposant leur dossier auprès de l’administration mais n’ont pu effectuer les travaux dans les délais prévus ; cet amendement avait été accueilli favorablement par Ségolène Royal. Toutefois, porter ce délai supplémentaire de trois à cinq ans, comme le propose M. Sermier, me semble excessif. Avis défavorable.
Mme Laurence Abeille. Je partage l’avis de Mme la secrétaire d’État. Si nous allongeons encore le délai accordé pour la réalisation des travaux, nous savons que, dans deux ou trois ans, nous n’aurons toujours pas avancé. Il faut envoyer un signal aux exploitants et aux propriétaires.
M. Jean-Marie Sermier. Il faut en effet leur envoyer un signal, mais en portant le délai supplémentaire dont ils peuvent bénéficier à cinq ans, faute de quoi toutes les opérations ne pourront pas être réalisées. En outre, et vous l’avez précisé avec juste raison, Madame la secrétaire d’État, ce délai serait accordé aux propriétaires et exploitants de bonne foi, qui ont déjà déposé leur dossier administratif. Il s’agit simplement de leur donner le temps nécessaire pour réaliser les travaux.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD466 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 51 undecies B ainsi modifié.
Article 51 undecies (articles L. 218-83, L. 218-84, L. 218-86, L. 612-1, L. 622-1, L. 632-1 et L. 640-1 du code de l’environnement) : Contrôle et gestion des eaux de ballast et des sédiments des navires
La commission adopte l’article 51 undecies sans modification.