Bonjour
Comme le savez, Hydrauxois a lancé une nouvelle rubrique
idée reçue pour faire des synthèses argumentaires sur les principales erreurs / omissions / manipulations qui circulent sur la petite hydraulique.
Il y en a une que je lis souvent – elle m'a encore été signifiée voici quelques mois dans un échange épistolaire avec un ponte de FNPF –, selon laquelle les moulins étaient vertueux dans le temps, mais qu'aujourd'hui ils dégradent les milieux.
En gros :
- avant il y avait des gentilles roues, pas de méchantes turbines
- avant on faisait des chasses, au lieu de laisser les vannes fermées
- les moulins ont donc dégradé les milieux à mesure qu'ils ont cessé leurs activités, ce qui justifie qu'on tire la sonnette d'alarme
C'est un moyen d'accuser les moulins en dépit du bon sens (on ne peut évidemment pas démontrer qu'ils se sont multipliés après les années 1950, alors on essaie de trouver une autre raison, leur abandon à partir des années 1950. Bref, quand on veut tuer son chien...)
Je ne connais pas vraiment d'études synthétiques à ce sujet, c'est plutôt du témoignage historique (dur à retrouver en archives).
Toutefois, cette idée que le moulin était forcément mieux avant me paraît globalement fausse (par observation et par rapport à ce que j'ai pu lire de ci de là). En vrac :
- beaucoup de moulins avaient déjà abandonné la roue pour la turbine entre 1840 et 1918, car les turbines étaient plus productives
- la conscience de l'environnement est récente, les moulins ne se posaient généralement pas des savants problèmes sur les périodes de frai du blageon ou les troubles à la montaison du chabot
- le moulin avait besoin de l'eau a des moments précis, il travaillait en éclusée si nécessaire avec les variations de débit / sédiments fins que cela peut impliquer
- les débits réservés n'existaient pas ou étaient moins importants hier qu'aujourd'hui
- les seuils anciens ont rarement des vannes de chasse (de la retenue) bien dimensionnées : soit il n'y en a pas du tout, soit elles sont de petites dimensions (et ne permettent pas du tout de "curer" toute la retenue) ; c'était les biefs qui étaient souvent curés, pas forcément les retenues
- les moulins étaient des usines, et certains usages avaient probablement des impacts par leurs rejets locaux : forges, tanneries, foulons, etc.
Avez-vous des idées / références à ce sujet ?
Nota 1 : ces impacts anciens même s'ils existaient ne se traduisaient apparemment pas par des troubles importants pour les milieux aquatiques (cf la longue persistance jusqu'au début ou milieu du XXe siècle des espèces pollusensibles comme les anguilles, les truites, les saumons, les écrevisses à pattes blanches ou à pied rouges, etc.)
Nota 2 : à côté de cela, je suis d'accord que les propriétaires actuels ne peuvent pas ignorer les obligations de leur règlement ni les rudiments de la culture hydraulique, rien ne m'agace plus qu'un site laissé à l'abandon ou négligé. C'est simplement que pour les milieux, il me semble que certains exagèrent beaucoup la situation actuelle par rapport à la situation ancienne, et ils le font avec de mauvaises intentions (dire aux gens "soit vous vous comportez comme des meuniers du XVIIIe siècle en étant 24/24 devant votre roue, soit vous effacez votre ouvrage devenu sans usage").
Nota 3 : même pris au sérieux, l'argument est réversible. Si c'est l'abandon d'activité du moulin qui nuit au milieu, alors ré-équipons très vite tous les moulins en production d'énergie ! Mais vous dites cela à un apparatchik de la FNPF et il fait une attaque, ces gens là ont une allergie au mot "turbine", bien que l'hécatombe organisée des poissons à chaque ouverture de pêche ne les dérange pas